top of page
Rechercher
  • Photo du rédacteurLéa Masson

Move it Kanal, une médiation bilingue ?


Lasso est une association à but non lucratif (ASBL) bruxelloise bilingue. Sa mission est d’encourager la participation culturelle des jeunes âgés de 12 à 18 ans, en misant sur la collaboration entre différentes organisations et communautés linguistiques, francophone et flamande. Son but social est de constituer un pont entre la culture et les jeunes. Pour ce faire, les membres de l’équipe de Lasso organisent des rencontres entre différentes ASBL francophones et néerlandophones, afin de créer des projets communs liant les secteurs de la culture, de la jeunesse et de l’éducation. Finalement, l’ASBL opère de manière indirecte sur son public (les jeunes âgés de 12 à 18 ans), par le biais d’un public direct (composé d’acteurs culturels, de la jeunesse et de l’éducation) qui agit comme un relais. De plus, Lasso divise son travail en trois grands axes, à savoir la mise en réseau, les projets pour et par les jeunes, et la recherche.


Présentation du projet

Le projet que nous avons eu l’occasion d’analyser dans le cadre de ce travail s’appelle Move it Kanal. Il s’agit d’une initiative bilingue visant la participation culturelle des jeunes de la zone du canal, en vue de créer du lien entre les populations qui y vivent. La première phase de recherche de Move it Kanal a débuté en 2016. Cette année-là, 55 jeunes ont été sondés par l’association afin de connaître leur rapport à la culture, et leur niveau de participation culturelle. Des entretiens avec des professionnels de la culture, de la jeunesse et de l’éducation ont également été réalisés dans le but de comprendre les besoins et manquements culturels de la zone du canal. À la suite de ces entretiens, trois grands projets ont été imaginés. Ces derniers, sans doute trop ambitieux, ont finalement été révisés en 15 projets, plus petits, répondant davantage à la demande.



Move It Kanal a pu voir le jour grâce au financement du Fonds Européen de Développement Régional (FEDER), une aide financière de l’Union européenne. Il a également été cofinancé par la Vlaamse Gemeenschapscommissie (VGC), ou Commission communautaire flamande (COCON) en français. Étant une ASBL néerlandophone, Lasso reçoit une part plus importante de subsides du côté flamand, bien que la Commission communautaire française (COCOF) contribue également à la conception de leur budget. Travailler sur des projets bilingues nécessite de bénéficier des fonds FEDER. Malheureusement, après six années de financement, Lasso ne peut plus continuer ses activités liées à Move It Kanal. C’est pour cette raison qu’ils souhaitent pérenniser le projet, afin que celui-ci puisse poursuivre son chemin en toute autonomie.



Question de recherche initiale

Suite à nos premiers entretiens avec l’équipe de Lasso, nous avons établi une question de recherche portant sur la manière dont l’ASBL met en pratique la médiation culturelle entre deux communautés linguistiques et culturelles différentes. En effet, Lasso se définit comme mettant le bilinguisme au centre de leurs projets et de leurs actions. Cependant, en analysant leur travail sur le terrain, nous avons remarqué que la problématique n’était pas tant liée à la question de médiation entre deux publics linguistiques distincts. Notre question n’était, dès lors, plus pertinente. Nous en avons pris conscience durant notre participation à la journée d’inspiration organisée par Lasso, qui clôturait les six années de Move it Kanal.



La journée d’inspiration, un tournant réflexif

Pour mettre un terme à leur projet Move It Kanal, Lasso a organisé une journée d’inspiration le 16 novembre 2021 à la Maison des Cultures et de la Cohésion Sociale de Molenbeek. Cet événement était l’occasion de faire de la mise en réseau, du networking. Lasso a donc invité une kyrielle d'acteurs du milieu éducatif, associatif et culturel afin que ceux-ci entrent en contact les uns avec les autres, grâce à plusieurs activités prévues tout au long de la journée.


Ainsi, Lasso a notamment installé un mur photo sur lequel chacune des personnes présente avait l’opportunité d’afficher les biens et/ou services qu’elle avait à offrir, ou qu’elle recherchait en fonction de projets menés au sein de leur institution. D’autres activités telles que trois brainstormings, tous liés à la participation culturelle, permettaient aux invités d’échanger sur une thématique centrale partagée par tous. Alors que Lasso prétend faire de la médiation avec des publics bilingues, nous avons remarqué que toutes les activités organisées ce 16 novembre séparaient les francophones et les néerlandophones en deux groupes distincts, faisant simultanément la même activité, mais sans pour autant se mélanger.


Par la suite, nous nous sommes penchés sur le networking tant mis en avant par Lasso en nous demandant s’il était effectif. La journée d’inspiration nous a permis de rencontrer Marine Vankeer, médiatrice culturelle chez Arts et Publics. Nous l’avons contactée afin de savoir si, suite à la journée événement, elle était parvenue à rester en contact avec un·e ou plusieurs acteur·ice·s rencontré·e·s ce jour-là. Elle nous a alors répondu que certaines personnes avec qui elle avait discuté le 16 novembre faisaient déjà l’objet de collaboration avec son association (la Fonderie, le Centre Tour à Plomb et Move ASBL). Par contre, elle a eu l’occasion de faire la rencontre des représentantes du Kanal - centre Pompidou et de Lasso, deux personnes qu’elle a invitées à l’occasion d’un événement au sein de son association Arts et Publics.


Même si ce retour semble être positif quant à la mise en réseau recherchée par Lasso, il est toutefois à prendre avec des pincettes. En effet, l’association Arts et Publics est francophone, et tous les acteurs avec qui Marine est restée en contact par la suite sont exclusivement francophones. La mise en réseau ne semble avoir fonctionné qu’au sein de chaque groupe linguistique.


Aussi, nous n’avons eu qu’un seul et unique retour lié à cette journée d’inspiration. Il n’est donc pas nécessairement représentatif d’une réalité à échelle plus large. Il reste malgré tout interpellant, puisqu’il s’agit de la réalité d’au moins une association, et si ce cas de figure s’est présenté pour Arts et Publics, il n’est pas à exclure que d’autres ASBL l’aient également expérimenté, tant du côté francophone que néerlandophone.


Finalement, notons que nous n’avons que très peu de recul, nous portons un regard assez subjectif. Il est encore trop tôt pour affirmer si ces dispositifs sont efficaces à long terme.


Suite à cette journée d'inspiration, et à tous les éléments que nous avons recensés sur place ainsi qu’ultérieurement, nous avons fait évoluer notre question de recherche. Notre question initiale - comment faire de la médiation avec des publics bilingues ? - est devenue : “Comment outiller la médiation culturelle pour des publics linguistiquement hétérogènes ?”





Nos pistes d’améliorations

Le projet Move It Kanal a été mené adéquatement aux besoins présents sur le terrain. La médiation s’est volontairement greffée en tant que soutien à des projets culturels existants, et élaborée par et pour les jeunes. Les fonds dédiés à ce projet ainsi que l’investissement des personnes qui l’ont porté ont permis de mener à bien ces actions de médiation culturelle bilingue. Cependant, ces actions posent de réels défis, qui ont, en partie, été résolus.


Effectivement, la médiation bilingue n’est pas une mince affaire. Ce que nous avons pu observer, c’est que la médiation a été menée correctement, tant dans les projets francophones que néerlandophones. Cependant, les projets qui comptaient en leur sein le croisement des deux communautés linguistiques n’ont pas réellement perduré. En effet, la pratique d’un projet bilingue dans un cadre de la médiation culturelle est mise à mal par la communication fragmentée que cela engendre. D’autant plus quand le développement de cette médiation est varié (ce qui est le cas du projet Move It Kanal) et que les interactions avec le public se modèlent directement en fonction de ce dernier.


Lasso met en place et crée des dispositifs visant à répondre principalement à l’éveil culturel des jeunes. En analysant ceux-ci, nous avons remarqué qu’ils avaient été pensés de manière à ce que les publics puissent se les approprier. À l’image de BabbelArt, un jeu de société imaginé par Lasso. Il constitue un outil que le public peut s’approprier de manière autonome, en français ou en néerlandais, et qui vise l’émancipation de ce dernier.


Nous avons également relevé le fait que le caractère strictement bilingue de la médiation faite par Lasso puisse faire de l’ombre à d’autres langues parlées dans la zone du canal, qui n’étaient dès lors pas prises en considération. Et que de ce fait, le degré d’accessibilité en pâtissait. Cependant, il est important de souligner que le public direct de Lasso est plus les associations culturelles ou d’éducation qui travaillent avec les jeunes de la zone du canal, que ces jeunes en tant que tel, qui constituent plutôt un public indirect. Ces associations sont francophones, ou néerlandophones. Ce faisant, l’accessibilité n’est pas tellement mise en péril. Encore moins, lorsqu’on prend en compte que ce public, à savoir les associations, est un public proche du lieu de la médiation culturelle.



Conclusion

Nous avons pu constater au long de ces quatre derniers mois qu'outiller la médiation culturelle pour des publics linguistiquement hétérogènes constitue un défi de taille. Ceci, pour plusieurs raisons. Comme nous l’avons évoqué précédemment, nous distinguons la volonté de lier deux communautés et deux langues différentes à travers les dispositifs mis en place par Lasso. Force est de constater qu’il est difficile de résister au confort d’exercer une activité avec un public unilingue, bien plus facile à mettre en place pour des raisons externes à la simple volonté des médiateurs culturels. Bien que les outils mis à disposition soient ludiques et répondent à certains besoins du public, on pourrait penser à remodeler certains de leurs paramètres pour qu’ils puissent valoriser le désir d’harmoniser deux des langues nationales, à savoir le français et le néerlandais. Cependant, nous soulignons tout de même que la non-existence de médiation vers un public bilingue au sein d’une même activité n’enlève en rien la qualité de la médiation que Move It Kanal a pu proposer lors de ses différents projets.


Article écrit par Abigaëlle Pete, Alexandra Neale, Célia Werner, Charline Mohr, David Perra Gonzalez, Dounia Moulinasse, Emilie Leclercq, Emma Soto et Sarah Vandevelde

44 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout
Post: Blog2_Post
bottom of page